Cabris...
- poème -
Voici la bourgade éternelle
Avec son clocher, sa chapelle
Sa poule qui vous fuit
Et son chien qui vous suit
Voici tous les nids d’hirondelles
Et, flottant parmi les ruelles
Son odeur de pain cuit
Voici les demeures humaines
Des vieilles qui portent les mitaines
Voici les chats silencieux
Qui, pour vous voir clignent des yeux
Voici la noble châtelaine
Venant une fois par semaine
Trouver le notaire ennuyeux
Le bambin curieux et timide
Sa frimousse fraîche et humide
Sur leur banc les vieux engourdis
Espérant quelque paradis
Et la jeune fille intrépide
Près de la fontaine limpide
Rêvant aux bals des samedis
Voici la place qui domine
Près de l’inévitable ruine
Son vaste royaume de champs
Et de cerisiers alléchants
Lorsque mai verdit la colline
Et qu’une allégresse divine
S’exhale des soleils couchants
Voici la familière église
Où le nouveau-né se baptise
Voici les croix en rangs serrés
Où les parents sont enterrés ;
Jeanne, Paul, Augustin, Elise
Viennent après quelque sottise
Consulter Monsieur le Curé
Voici la vie simple et charnelle
Que le voyageur se rappelle
Même s’il n’est jamais venu
Même s’il n’en a rien connu
Voici la bourgade éternelle
Avec, flottant dans la ruelle
Son passé maintenu
- avril 1950 -