Festival de Cannes : J moins 7,
Mai 68 fait-il encore rêver ?
À J moins 7, rien en vue, pas de grève des intermittents du spectacle, pas de défilés, pas de débrayages de services municipaux ou de la police… Pourtant la date anniversaire de mai 68 semblait on ne peut plus propice à l’organisation de manifestations contestataires. Qu’auraient fait et dit François Truffaut, Roman Polanski et autres Godard, Berry, Forman, Malle, animateurs et extincteurs de ce Festival de l’an 68 qui se termina aussitôt commencé ? Qu’auraient-ils souhaité pour commémorer l’événement ?
Quarante ans après qu’y a-t-il de changé ? Notre société est devenue plus permissive alors que paradoxalement, mandature après mandature, les interdits se sont multipliés. La ceinture de sécurité, le casque pour la moto, la CSG et autres… obligations. Au total, plus de devoirs que de droits. Métro, boulot, dodo, chômage, on ne s’étonne plus de rien et surtout pas de la violence qui envahit notre quotidien et les écrans de nos téléviseurs. Nous sommes devenus incapables de savoir si ces images servent de déclencheurs où si elles ne sont que le reflet de notre environnement…
Pourtant, aujourd’hui encore, les collégiens faisaient la une, encouragés par des profs irresponsables qui feraient mieux de se remettre en cause, eux et leur institution défaillante, au lieu de réclamer plus de moyens, c'est-à-dire plus de sous, plus de postes… comme si c’était là le problème. Tiens voilà un bon sujet de scénario ! Mais à Cannes toujours rien. Aucune annonce, aucun fanion à brandir, aucun étendard sanglant à lever, ni pour le Tibet ni pour Betancourt. Même Emmanuelle Béart n’a prévu, aux dernières nouvelles, aucune action en faveur des sans papiers et des SDF… Quant à Michael Moore, autre « troublion » venu d’outre atlantique, même les démocrates américains n’en veulent… plus.
Qu’est donc Mai 68 devenu ? Un sujet de plus pour des journalistes qui, comme moi, sont en mal de copie et doivent rendre, tôt, leur devoir ? Alors on ressort des archives les cadavres, les vieilles photos, les témoignages douteux, attendris et attendrissants pendant qu’en Birmanie on ne compte plus les morts… mais comme il n’y avait pas de touristes européens et de vagues dévastatrices à filmer… on ne recueillera pas pour les survivants le quart de la moitié du tiers de ce qu’on avait récolté pour le tsunami de Thaïlande…
Ultime bastion de la révolte ou plutôt de son souvenir, Mandelieu où
Mai 68 sera célébré lors des 6èmes Visions sociales
, du 17 au 25 mai, en plein Festival : lire ici l’article.
Deux films distribués par Metropolitan film export auraient pu apporter au Festival une touche plus engagée, plus sociale. Il s’agit de « Les USA contre John Lennon », un film écrit et réalisé par David Leaf et John Scheinfeld. Un document très fouillé sur l’engagement du Beatles contre la guerre au Vietnam et les représailles qui suivirent. Pour Yoko Ono, de tous les documentaires fait sur John Lennon, c’est celui qu’il aurait préféré.
- Charlize Theron -
L’autre film est de Stuart Townsend. Il évoque avec force « La Bataille de Seattle », première réaction contre la mise en coupe du commerce à l’échelle de la planète toute entière. La réaction violente des autorités déclancha un mouvement de révolte et fut l’un des événements fondateurs de l’alter mondialisme, du commerce équitable, de l’opposition au libre échange et à l’ultralibéralisme. Charlize Theron et Michele Rodriguez y font une prestation remarquée.
- la Bataille de Seattle -
Sortis en salle le mois dernier, règlement oblige, ils n’auraient de toute façon pas pu être de la sélection. Tant pis, ne soyons pas plus royaliste que le roi, le Festival 2008 sera… calme, consensuel, apaisé… bien qu’avec un président du jury comme Sean Penn, on ne puisse jurer de rien… Avec cet enfant terrible, tout est toujours possible.
Alain Dartigues
- mention : www.pariscotedazur.fr – mai 2008 - - écrire au magazine, s'abonner, se désabonner -