Genève Annemasse : le train de la discorde entraîne
des deux côtés des réactions exacerbées… Politiquement correct s’abstenir.
Le projet de construction d’une ligne ferroviaire reliant la ville d’Annemasse à celle de Genève en 15 minutes ravive les contentieux entre certains citoyens de ces deux villes. Le Mouvement Citoyen Genevois et surtout le parti populiste, l’UDC, dénoncent ce qui d’après eux, serait une incitation pour les délinquants à passer la frontière avec plus de facilité pour y pratiquer leurs activités… En pleine campagne électorale, c’est une aubaine qui a donné lieu à la confection d’affiches anti-minarets qualifiées de racistes et xénophobes et d’un encart publicitaire dans La Tribune de Genève faisant référence à la « racaille d’Annemasse ».
Le maire d’Annemasse, Chrisitan Dupessey, partisan de cette ligne ferroviaire, se trouve dans la quasi obligation… politique de réagir. Ne sommes-nous pas dans le pays des Droits de l’homme ! Il se voit forcé de porter plainte, en France, contre le président, en Suisse de l’UDC, Soli Pardo pour incitation à la haine raciale.
Derrière cette polémique, il y a une réalité, celle de la délinquance qui perdure dans cette région frontalière. Déjà en 1999, le sénateur de Haute-Savoie, Pierre Herisson, interpellait le Ministre de l’intérieur, Jean-Pierre Chevènement, au nom de plusieurs maires et d'élus de communes frontalières avec la Suisse. Ces derniers se plaignaient de l'évolution préoccupante d’une délinquance de plus en plus violente et qui touchait des mineurs de plus en plus jeunes. Poussé dans ses derniers retranchements par le sénateur, le ministre à bout d’arguments déclarait : « Je fais en sorte que l’État républicain puisse assurer à tous nos concitoyens, y compris… dans la circonscription d’Annemasse, le droit à la sécurité qui leur appartient. » Les gouvernements se sont depuis succédés sans pour autant régler la question.
Si le maire a depuis obtenu sur ce dossier quelques résultats, il est difficile de faire des miracles devant l’ampleur des problèmes. Le commissariat d’Annemasse compte 121 policiers nationaux pour les 65 000 habitants de la commune et des cinq autres communes voisines. Installée depuis le mois de septembre, le commissaire de police par intérim, Judith Gäbel, 28 ans, ne peut que constater comme son prédécesseur que la délinquance dans la circonscription est liée au trafic de drogues. Elle envisage, dit-elle, de continuer « à agir au niveau judiciaire ainsi qu'avec des contrôles, des interpellations comme cela s'est fait jusqu'à présent. »
Un habitant des quartiers résidentiels d’Annemasse nous donne son explication : « Tout le monde fait des commentaires, accusant l'UDC de racisme anti-frontalier. Ceux-là font semblant de ne pas comprendre et, pour éviter de voir la vérité en face, accusent l'UDC de tous les maux. La vérité est plus prosaïque. Les Suisses en ont marre d'être la proie des bandes de jeunes en provenance d'Annemasse (75% d'enfants d'origine extra-européennes dans les écoles d'Annemasse). Un gros pourcentage de la criminalité de la région genevoise est le fait de cette population. Par conséquent, il n’est pas étonnant que certains voient d'un mauvais œil la mise en place d'un réseau de transport en commun qui va faciliter l'accès à leur pays. L'UDC a donc produit une affiche un peu démagogique et racoleuse (en reprenant le terme de racaille utilisé par Nicolas Sarkozy !) et tous les autres partis (surtout ceux de gauche) ont joué les vierges offensées et ont détourné le message. »
Laissons le mot de la fin à Ahmet, un jeune Annemassien. Questionné par un journaliste suisse, il commente, pince sans rire : « La Suisse, elle a sa racaille ! D’abord les Suisses, puis les Kosovars et les Roms. Le marché est pris. »
- aux dernières nouvelles, le conseil d’État de la ville de Genève, au nom de la liberté d’expression, ne compte pas interdire les affiches incriminées… au contraire de Lausanne, Montreux et Bâle.
- les températures observées hier dans plusieurs régions de Suisse sont les plus hautes enregistrées depuis près de 30 ans pour un mois d'octobre. Les températures ont dépassé, ici et là, les 28 degrés. Serait-ce dû au désordre climatique ou aux réactions autour d’une affiche ? Qu’en pense Nicolas Hulot ?