Ecologie : « Home », sweet home. Pas si sweet que ça !
Le mobil-home des hommes, des animaux et des plantes, est bien abîmé. Les glaciers fondent, la banquise aussi et avec elle nos espérances d’un monde auquel le Progrès devait apporter prospérité et bonheur.
On nous avait promis 100 millions de spectateurs répartis sur les cinq continents. Ils ne furent pas si nombreux mais ne boudons pas notre plaisir. En France, ils furent 8 millions de spectateurs à avoir vu le film de Yann Arthus-Bertrand. Combien parmi eux changeront le monde où, pour commencer par le plus facile, modifieront leurs comportements ? Ne soyons pas plus pessimistes qu’il le faut. Certains, aux Européennes ont laissé apparaître qu’ils avaient été touchés par le message et par les… belles images d’un monde finissant, un monde qui a perdu son innocence, un monde dont leurs enfants ne connaîtront certains aspects qu’à travers les livres de photos, les documentaires à la télé et ce film.
Question accessoire : parmi les 6 milliards et chaque jour un peu plus, de ces habitants qui peuplent nos grandes métropoles, combien connaissent ce monde, sa beauté, sa sauvagerie ? Combien parmi eux ne quittent pas leur quartier et ne savent plus très bien d’où vient le BigMac qu’ils mangent ni avec quel matériau les Jeans qu’ils portent sont fabriqués. Tout ça, la problématique de la biodiversité, le développement durable, la protection de l’environnement, c’est pour eux complètement abstrait. Ce sont des mots, ce ne sont pas les choses. Merci Monsieur Krisnamurti !
Le vote des électeurs qui a donné un score flatteur à la liste Europe-Ecologie
a, avant tout, une valeur symbolique. Ils ont voté écolo sans trop savoir qui étaient vraiment les leaders, leur programme, leur avenir… politique. Peut-on raisonnablement rêver que, par miracle, ils arrêtent du jour au lendemain de se chamailler, tout en laissant la situation se dé-terre-iorer ? Nicolas Sarkozy a déjà tout compris et, fin stratège, ne fera qu’une bouchée de cette manne électorale. Il se fera un devoir de brouiller les pistes… en vertu des grands principes, et de détourner cette géniale dynamique à son profit… en vertu des grands sentiments. Merci Monsieur Guy Béart !
Comment pourrait-il en être autrement. Ne perdons pas de vue que ce film bon chic bon genre, a été réalisé par Yann à la crinière argentée, grand producteur de CO2 de par les cieux. Film produit par l’homme de la situation, Henri Pinault et distribué par Luc Besson, qui il est vrai, ne roule qu’en Taxi mais ne semble pas avoir pour autant un respect démesuré pour la Loi littoral… Quel est leur bilan carbone, quel est le nôtre, sachant qu’à moins de se nommer Harpagon, plus on est riche et plus il est élevé…
Le film « Home » aurait donc donné une bouffée… d’oxygène à des écolos français et européens… en fin de cycle. On peut se poser aussi une autre question. Au vu des résultats électoraux, nos politiques auraient-ils donné le feu… vert pour la diffusion, à la veille d’un scrutin électoral, de ce film, s’ils en avaient connu d’avance les résultats ? Se seraient-ils laissés indûment dépouillés de leur électorat traditionnel, qu’il soit de droite comme de gauche. ? Car pour une fois, ce sera peut-être la seule fois d’ailleurs que les écolos ont séduit tout azimut. Pour les Régionales, prochaine échéance au programme, les choses seront moins évidentes et il est peu probable qu’ils transforment leur essai. Cela dépendra de la dynamique insufflée par le brelan gagnant : Dany le soixante-huitard passé au vert, José le paysan anti-mondialiste et Eva la… justicière. S’ils retrouvent leurs vieux réflexes, c’est foutu !
Les images étaient belles, très belles, trop belles peut-être. On se serait cru dans une émission de Nicolas Hulot, bien lissée, ou feuilletant une luxueuse revue sur papier glacé vantant les charmes de voyages au bout de monde… à 2000 € la nuit : Soyez donc les derniers à voir les derniers ours blancs, les derniers Inuits, les derniers… les derniers quoi ! Il y a de l’angélisme dans ce spectacle BCBG. Merci Monsieur Yann Arthus-Bertrand, vous avez bien mérité !
Merci aussi quand vous témoignez : « Les scientifiques nous disent que nous avons 10 ans pour changer nos modes de vie, pour éviter d’épuiser les ressources naturelles et prévenir une évolution catastrophique du climat de la Terre. L’enjeu est vital pour nous et pour nos enfants. Nous n’avons plus de temps à perdre. »
Dix ans, vous avez dit dix ans et on ne nous a rien dit ? Pourtant, les membres du Club de Rome
, dans les années 60, avaient soulevé le voile et avancé l’idée d’une croissance zéro. Nous n’en sommes plus là aujourd’hui. Les décideurs ont toujours eu toutes les informations nécessaires. Ils savaient pertinemment que la planète souffrait. Qu’ont-ils fait, à part nier l’évidence et poursuivre leur fuite en avant, toujours plus, toujours plus de croissance, plus de déchets, plus d’atomes libérés… Ils savaient mais au plus profond d’eux-mêmes, ils n’y croyaient pas.
Croient-ils davantage aujourd’hui, grâce au film de Yann Arthus-Bertrand, qu’on aurait pu sous-titrer : la Maison brûle ? À ce propos, pour ceux qui pensent que la désespérance est salutaire, il leur faut lire, séance tenante, le livre de Bertrand Méheust « La politique de l’oxymore ». Plus décourageant, tu meurs ! Plus difficile aussi que de regarder, assis dans un confortable fauteuil, les 50 pays vus du ciel, magnifiquement filmés durant 3 ans, « ce chef-d’œuvre d’images aériennes, qui marque l’aboutissement de plus de trente ans d’engagement au service de la planète. » Merci Monsieur Yann, on avait compris !
Alors, « Home », film alibi pour écolos bobos ? C’est à vous de voir ! En tout cas, aux lendemains de ce Home-trainer, il faudra davantage que de simples bonnes résolutions pour voir le danger s’éloigner. Tout juste s’éloigner, car, individuellement aussi bien que collectivement, ne l’oublions pas, nous sommes dans cet univers, programmés pour disparaître.
Je sais, je sais, ce texte est un rien provocateur. Cordialement vôtre et bonne soirée quand même, il y a les Experts de Miami
à la télé !