Dépenses publiques : comment moderniser l’Administration sans faire trop de… dégâts électoraux ?
L’Italie, le Royaume-Uni et le Canada ont chacun leurs recettes.
- Le Canada :
Des toutes premières places au classement des pays les plus développés, il avait rétrogradé vers le milieu des années 80. Inquiets, ses dirigeants avaient su réagir et renverser en quelques années la situation. Sous l’impulsion de son 1er ministre, l’administration fédérale du Canada avait d’abord mené une étude approfondie de ses dépenses. Chaque service, du plus grand au plus petit, fut invité à justifier, dollar après dollar, les frais engagés. C’est ainsi qu’à l’aune de ces résultats et avec toute l’objectivité nécessaire, les budgets furent revus, le plus souvent à la baisse. Des services disparurent, d’autres gagnèrent quelques rallonges. Au final, le Canada regagna des points et sorti de la zone des mauvais élèves…
Le pays de la feuille d’érable s’engage maintenant vers une autre réforme qui vise à améliorer la gestion des ressources humaines. Un rapport sur la question, datant de 2008, avait pointé du doigt un système « extrêmement lourd et complexe ». Les responsables des responsables des ressources humaines avaient alors mis en place un certain nombre de mesures destinées à rationaliser et à simplifier l’organisation des ressources humaines.
- Le Royaume-Uni :
Depuis 2005, le Royaume-Uni s’était lancé à son tour dans l’examen attentif et sans concession de la performance de ses ministères. Il en avait profité pour définir des priorités en matière de stratégie, d’organisation et de gestion des ressources humaines. Dix-huit ministères ont déjà été passés en revue, certains se voyant préconiser des mesures radicales. Ainsi l’administration centrale du ministère de l’Education nationale devra réduire ses effectifs d’un tiers, en… trois ans. No comment !
Les audits ont mis en évidence tout l’intérêt de moderniser les fonctions supports comme l’informatique, la Gestion des ressources humaines, les achats ainsi que la nécessité de mieux répondre aux attentes des usagers et à leur accueil.
Rapidement les résultats se sont faits sentir. Des experts indépendants les ont évalués et en ont soulignés dès 2007, les impacts positifs. Ils préconisent néanmoins une meilleure définition du rôle des administrations et de leur ministère, une réduction de la chaîne hiérarchique dans les administrations centrales comme des services déconcentrés, une plus grande concertation avec les experts de la société civile ou encore un examen de tous les moyens d’amélioration de la prestation de services.
- L’Italie :
Dans tous les bureaux de tabac de la péninsule, il est désormais possible, depuis mai 2008, de venir toucher le montant de sa retraite. Ou encore, de se voir délivrer son nouveau passeport à la Poste de son quartier. Cette forme d’externalisation des services publics, étendue aujourd’hui à tout le pays, a pour nom « Réseaux amis ».
Ce projet a pour objectif d’en finir avec la « culture de la file d’attente » dans les administrations, au profit des services et commerces de proximité. Ainsi, tous les lieux fréquentés régulièrement par la population peuvent constituer des fournisseurs potentiels de services publics : pharmacies, gares, bureaux de poste ou encore grandes surfaces. Une stratégie appliquée depuis longtemps au Canada. Charles Trenet avait même évoqué dans une de ses chansons, ces pharmacies québécoises où l’on trouve, outre des… pharmaciens et des médicaments, des timbres, des boîtes de soupe Campbell, des parfums et de la papeterie ou des produits d’entretien ménager… Pour le gouvernement italien, il s’agit d’une logique de marché qui introduit une concurrence susceptible d’aboutir à l'amélioration de la qualité du service rendu tout en favorisant l’économie des deniers publics.
- D’autres pays comme l’Australie, l’Espagne, les Pays-Bas ou le Portugal ont également entamé une refonte profonde de leurs administrations. Si les méthodes peuvent différer d’un pays à l’autre, les objectifs recherchés sont en revanche toujours les mêmes : modernisation des services publics, optimisation des dépenses et professionnalisation des métiers de la Fonction publique.
- En France :
Force est de constater que ce pays renâcle à engager des réformes profondes. Beaucoup de gouvernements et surtout de ministres s’y sont cassés les dents. Échecs particulièrement cuisants, ceux qui concernent l’Education nationale. Combien de ministres y ont laissé de plumes et durent abandonner leur portefeuille à essayer de « dégraisser le mammouth ! »
Nicolas Sarkozy s’était engagé à effectuer tout un train de réformes, sans doute essentielles. On peut constater toutes les difficultés qu’il a à les mener à bien. Les Français ne semblent pas avoir compris qu’il a été élu pour cela. Sans doute ont-ils voté sans se préoccuper de lire son programme. Il est vrai que pour beaucoup, le choix était ailleurs et, que, passé le premier tour, la pile ne valait pas la face.
On peut aussi remarquer qu’en ce qui concerne l’Europe, c’est la même chose. La majorité des Français a voté oui au Référendum sur la Constitution tout comme elle l'avait fait pour Maastricht, sans vraiment réfléchir aux conséquences sur le moyen terme et le long terme. Le choix fait, ils s’étonnent maintenant que les Commissions européennes fassent les lois et soient au dessus des nôtres ; que la Cour de justice européenne devienne l’autorité ultime capable d’arbitrer nos conflits…
Alors, la France irréformable ? Il est vrai que comme le disait le Général de Gaulle : « Comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 246 variétés de fromages ? ». Plus optimiste, Churchill aurait, lui, affirmé : « Un pays qui produit plus de 365 sortes de fromages, ne peut pas perdre la guerre ! »
Avec un nombre de fromages si curieusement indéfini (246 ou 365 ?), en France, réformer sera toujours une gageure.