Nice : La planète chauffe, l’eau de nos bouteilles aussi
Christian Gallo qui a les yeux en face des trous, l’a bien vu…
« Il est dix-sept heures, il fait encore très chaud. La façade du supermarché, orientée au soleil couchant est brûlante. Le parking qui la prolonge, totalement goudronné, accentue encore cette chaleur. Le long des murs du magasin sont stockées depuis le matin, ou la veille, des palettes en bois surchargées par des produits emballés de plastique. Il est écrit en gros dessus Ne pas stocker à l’extérieur, mais peu importe, le tout est brûlant. »
Parmi les multiples produits emballés qui viennent des quatre coins de la France ou de l’Europe ou qui sait de la Chine ou de l’Amérique du Sud, et qui prennent bien involontairement un bain de soleil sur la Côte d’Azur, il y a de l’eau minérale. De cette eau si précieuse, si capable de nous faire, maigrir, de nous apporter les sels minéraux (ou leur absence) indispensables à notre équilibre et notre santé, si pure que les bébés en raffolent et parfois utiles aussi quand l’eau du robinet est tellement chargée en nitrate qu’il faut se résoudre à la laisser couler sans la boire.
Christian Gallo, l’homme au nez long qui voit le monde à travers la lucarne niçoise de son FICANAS, a bien raison de dénoncer ce genre d’insouciance coupable de la part d’entreprises qui ne targuent par ailleurs d’être impliquées dans la protection de l’environnement et du consommateur… Plus écolos qu’eux, tu meurs !
On le sait bien, les arguments écolo : durable, biodiversité, environnemental, nature, bio… sont accrocheurs et surtout, de plus en plus… vendeurs. Derrière, on s’aperçoit vite qu’il y a une certaine distance entre les affirmations et les actes. On s’aperçoit que le système capitaliste et libéral a récupéré pour son compte… en banque les concepts. On s’aperçoit que les bouteilles en plastique se gorgent de soleil (le thermomètre dépassait cet été les 30 degrés à l’ombre…). Et qu’au passage ils se chargeaient de molécules pas très recommandables pour le buveur, surtout s’agissant d’une femme enceinte ou d’un tout petit.
D’ailleurs, et il a encore raison de l’ajouter, a-t-on vraiment besoin (s’il l’on n’habite pas la Bretagne, région où l’eau… potable l’est parfois si peu, à cause de son fort taux en nitrate et de la politique de l’agriculture française et européenne), de toute cette eau minérale embouteillée, distribuée dans le monde entier que l’on trouve sur toutes les grandes tables gastronomiques aussi bien que dans tous les Carrefour de la planète ? Surtout lorsque qu’elle est conservée avec si peu de soin…
Eaux de source, eaux de montagne, eaux minérales, eaux gazeuses, eaux enrichies,… en bouteilles plastique ou en verre, le consommateur a l’embarras du choix. Il ne saura jamais de quelle façon ce nouvel or blanc est conservé. Tant mieux, lui qui croit, qu’à ce prix là, il fait du bien à sa santé. Il en oublie que l’eau du robinet, sous nos latitudes, est potable. La Lyonnaise des… Eaux ne se gêne pas pour le rappeler chaque fois qu’elle nous envoie sa facture. Son eau serait quasi parfaite et en tous les cas, buvable en quantité et à un moindre coût ! Seul un petit goût de chlore est parfois décelable qui disparaît facilement rien qu’en mettant une carafe d’eau au réfrigérateur pendant une heure.
L’eau, lorsqu’elle est embouteillée, représente un marché particulièrement profitable (quand elle ne l’est pas, elle profite bien à des entreprises cotées en Bourse). La France produit six milliards de litres d’eau par an qui nécessitent au passage la fabrication de 170.000 tonnes de déchets qui viennent encombrer les centres de tri lorsqu’ils sont triés ou brûlent allégrement dans les usines d’incinération, libérant la… précieuse dioxine.
- connaissez-vous la Rolex des eaux en bouteille, la Bling, vendue 419 dollars US la bouteille de 75 cl dans sa version luxe ? Si l’eau minérale coûte plus ou moins 200 fois plus cher que l’eau du robinet, celle-là l’est plus de 150 000 fois. À ce prix là, on peut espérer au moins qu’elle ne traîne pas dans les entrepôts de nos supermarchés…
Alain Dartigues
- mention : www.pariscotedazur.fr – septembre 2009 – magazine fondé en 1959 - écrire au journal, se désabonner -