Régionales : échec pour notre démocratie,
échec pour tous les partis, principalement ceux en situation de gouverner…
Dans un État qui place la démocratie au dessus de tout, c’est une sacrée gifle. On s’attendait à un taux d’abstentionnistes important. Nous héritons d’un record dont nous nous serions bien passés. La faute à qui ? Cette fois, pas question d’invoquer la météo ou le manque de couverture médiatique, même si les journalistes et les sondeurs nous avaient convaincu que ce scrutin n’intéresserait pas les Français. Il faut bien creuser un peu plus loin, essayer de comprendre avant de tenter d’enrayer un phénomène que connaissent depuis longtemps les Américains, habitants de cette fédération d’états ultra-libéraux qui a pris l’habitude de se contenter d’un taux de participation qui, dans bien des scrutins, tourne autour des 50%. On notera l’exception notable des 66% d’électeurs américains qui avaient participé à la dernière élection présidentielle. Il est vrai que la communauté noire s’était mobilisée bien plus que de coutume.
Où, chez nous, le bas blesse-t-il ? Qui sont ces absents ? Sont-ils des électeurs de droite, déçus par des promesses non encore tenues, des réformes pourtant annoncées mais qui dérangent ? Des UMP qui ne supportent plus la politique d’ouverture du président (comme le député des Alpes-Maritimes, Lionnel Luca qui dit tout haut ce que ces petits copains murmurent dans les travées de l'Assemblée Nationale et du Sénat) ? De ceux qui, rapidement, ont fait de l’urticaire à la vue du comportement d’enfant gâté de Nicolas Sarkozy, et qui n’ont jamais digéré la première sortie présidentielle au Fouquet’s des Champs-Élysées, ni ses vacances sur le bateau du milliardaire Vincent Bolloré ?
Où chercher ces 47, voire 57 % dans certaines circonscriptions et départements (les Alpes-Maritimes et le couple Gaston Franco Dominique Estrosi ne peuvent se vanter d’avoir réussi à passionner les débats) ? Dans les rangs de la gauche qui se ronge les sangs avec le dossier Frêche et qui cherche de la cohérence entre les discours et les actes ? Besancenot, out, Bayrou out (ils reviendront sur le devant de la scène, rassurez vous !). Où sont passés leurs électeurs ? Ont-ils votés utiles ou sont-ils restés à la maison ? Bien sûr, le second tour devrait lever un peu le voile.
En attendant, on constate l’émergence des Écolos de Cohn Bendit, de José Bové et des sœurs magistrates qui seront peut-être bientôt rejointes par une Corinne Lepage qui a perdu son temps et entamé sa crédibilité avec une inutile vice-présidence du MoDem… Où ont-ils pris leurs voix ? Très probablement à la gauche. Mais peuvent-ils lui garantir que leurs voix, surtout celles qui viennent d’environnementalistes ni de droite ni de gauche, iront dans l’escarcelle du PS le moment venu ? Rien n’est moins sûr.
Quel est le poids de l’électorat des Français issus de l’immigration ? Sont-ils allé voter, ont-ils donné, comme prévu, leurs voix à ceux qui leur offrent le plus de garanties que leurs revendications seront pris en compte : le PS et les Écolos (Bayrou n’est pas mal non plus sur le coup) ?
Pour un Front National, relancé en son temps, par un François Mitterrand qui lui doit une partie de son élection, les choses sont plus simples. Jean-Marie Le Pen maintiendra tous ses candidats susceptibles de participer au second tour. Il n’a pas le choix d’ailleurs dans la mesure où l’UMP ne peut sans se discréditer, envisager des alliances avec cet infréquentable empêcheur de… voter en rond. Le patron du FN va, sans doute la dernière fois, faire trébucher la droite classique, d’où viennent, que ça plaise ou non de l’avouer, majoritairement ses voix. François avait vu juste, et post mortem, continue à mêler dans sa potion magique cet assaisonnement essentiel qui, à lui seul, déstabilise et divise l’électorat de droite…
Le taux de participation du second tour sera-t-il moins infamant pour des partis, surtout ceux qui ont pignon sur rue, pour des politiques qui font profession de diriger nos destins ? On le souhaite même si au final, on le sait, une voix, une seule, donne le pouvoir, même si un faible taux de participation suffit à conférer aux élus la légitimité de leur charge… Seuls les résultats comptent et les gagnants seront les gagnants avec peu ou beaucoup d’abstentionnistes. Comme on dit, les absents ont toujours torts !
Alain Dartigues
- mention : www.pariscotedazur.fr - mars 2010 - magazine fondé il y a cinquante ans… - écrire au journal, se désabonner -