Alpes-Maritimes : lettre ouverte au service de communication du Conseil Général...
Plusieurs journalistes de... proximité dénoncent un traitement inéquitable entre les médias. La presse nationale est privilégiée ainsi que le seul quotidien du département qui en vient, parfois, à faire du copié collé à partir des communiqués et des dossiers de presse institutionnels.
Le Club de la Presse Méditerranée 06, les rédactions de France Bleu Azur et France 3 Nice, viennent d’envoyer une lettre au directeur de la communication du Conseil général des Alpes-Maritimes, Éric Doré. Ils souhaitent attirer ainsi son attention et, surtout par ricochet, celle des élus concernés, essentiellement le président Éric Ciotti, « sur l’attitude consistant à privilégier certains médias en leur fournissant le contenu des conférences de presse plusieurs jours à l’avance, aux fins de publication. »
Les signataires argumentent en s’appuyant sur des exemples récents :
« Ainsi le jeudi 26 mai 2011, nous avons pu lire dans Nice-Matin une double page sur la Présentation des nouveaux moyens de lutte contre la fraude aux aides sociales, avec photographie de la brigade anti fraude et interview du président du Conseil général, alors qu’une conférence de presse sur ce sujet était programmée par le Conseil général des Alpes-Maritimes depuis une semaine pour ce même jour, à 11 heures.
Ce n’est pas la première fois que le Conseil général agit ainsi. Le précédent exemple date d’il y a moins d’un mois. Le contenu de la conférence de presse du 2 mai, intitulée Exceptionnel : Une grande consultation pour définir l’avenir des Alpes-Maritimes, était reproduit dans Nice-Matin deux jours auparavant. »
Enfonçant le clou un peu plus loin, les journaliste regrettent « la fin de non recevoir opposée par le Conseil général aux sollicitations de certains médias, alors qu’il livre ces mêmes informations à d’autres. Cette communication à deux vitesses ne respecte pas le principe de traitement équitable entre les différents médias et favorise certaines entreprises de presse au détriment d’autres. »
- Commentaires de la rédaction de Paris Côte d’Azur :
On se rappelle, qu’il y a quelques mois, Christian Estrosi avait été interpellé par plusieurs journalistes… locaux mais pas low-cost, sur la façon dont ils étaient considérés et traités par divers élus de la majorité ainsi que sur les critères d’attribution des achats d’espaces publicitaires aux médias. Un repas avait scellé un accord très… officieux de respect mutuel.
D’autres élus, avec plus ou moins de discrétion, ont affiché dans le passé, une désinvolture et un mépris envers les membres de la presse, ceux du moins qui ne traitent pas l’information à leur convenance. À ce propos, le conseiller général de Cannes Est (il ne l’était pas à l’époque) et premier adjoint du député-maire Bernard Brochand, avait fait assez fort dans le genre. Notre article d’avril 2008, mettait en parallèle la lettre de Paul Barelli, correspondant du Monde et vice-président du Club de la presse et la réponse de David Lisnard, guère flatteuse, c’est le moins qu’on puisse dire, pour les professionnels de la plume considérés pour l’occasion comme des journaleux. Lire ici l’article en question.
Les critères dans la sélection des médias, la transparence des budgets de communication, la répartition de la publicité, sont des sujets sensibles. S’ajoutent dans la balance, le poids des revues municipales et institutionnelles. Elles sont très gourmandes et phagocytent les budgets com/pub, fournissant aux lecteurs une information à sens unique, aseptisée.
Or, l’indépendance de la presse n’est possible que si sa diversité est acquise. La pluralité de la presse n’est-elle pas un des principes fondamentaux dans nos démocraties, une obligation morale ? Fragilisés par les crises qui se sont succédées, les médias qui ne vivent pas que des aléas des stars de la scène et des écrans, savamment distillés par les communicants, ont dans leur ensemble besoin qu’on les épaule. Il n’est un secret pour personne, du moins dans le milieu concerné, que divers titres dont Nice-Matin, quotidien régional en situation de monopole dans les Alpes-Maritimes, auraient beaucoup de mal à équilibrer leur budget. Sans l’apport considérable des publicités institutionnelles (CG, DR, État, Mairies, Intercommunalités), ils devraient réaliser des coupes sombres et licencier du personnel, la qualité de leurs enquêtes en pâtirait aussi. Ce genre de situation est à risque, elle créé une dépendance qui peut… influencer plus qu’elle ne devrait, la ligne éditoriale et le contenu journalistique.
La fronde des journalistes du Club de la Presse 06, est remarquable. Il est rare en effet que les professionnels de la presse haussent ainsi le ton et dénoncent ce genre de situation, avec en filigrane les implications politiques locales. Saluons-la !