Pierre Bonnard s’installe définitivement au Cannet...
Frédéric Mitterrand est venu officialiser la chose et donner la bénédiction à Michèle Tabarot, initiatrice de ce somptueux projet.
- le Ministre Frédéric Mitterrand et la député-maire, Michèle Tabarot -
Pour ceux qui passaient régulièrement devant le Musée, situé à une ruelle de la Mairie, il n’y avait aucun doute, le Musée Pierre Bonnard serait tout simplement grandiose. Pour ceux qui étaient plutôt contre pour des raisons politiques ou politiciennes ou plus objectivement parce qu’ils estiment que le prix à payer est trop élevé, il n’y a plus aucun doute : tel qu’il est de l’extérieur comme de l’intérieur, c’est une réussite. Réussite qui profitera aux habitants, aux voisins de la grande intercommunalité à venir et à tous les touristes qui, dès que la logistique et le marketing seront mis en place, ne manqueront pour rien au monde ce rendez-vous avec l’Art, avec un peintre majeur et son époque, avec un Cannettan de cœur qui a fait un beau cadeau en venant habiter cette commune et en y peignant quelques unes de ses plus belles œuvres.
Quant au contenu, il faut donner le temps au temps et laisser la collection s’étoffer peu à peu. Pour cette inauguration qui a déplacé un ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand en personne, une première exposition temporaire a placé la barre très haute. En effet, ce n’est pas demain la veille qu’on verra autant d’œuvres réunies de cet artiste dont Matisse pensait et disait le plus grand bien… Même si l’accent est volontairement mis sur la période du Cannet (1922 – 1947), cette représentation ressemble bien à une rétrospective avec des prêts venant de nos Musées nationaux et de collectionneurs privés. Des pièces rarement vues et essentielles à la connaissance et la compréhension de la démarche artistique du peintre. On pense à son autoportrait de 1931. Baptisé par Bonnard, « Le boxeur », il est l’aveu de cette lutte commune à nombre d’explorateurs de la lumière et de formes qui poussent leurs exigences aux limites de l’impossible, du terrible combat que l'artiste livre avec lui-même.
D’autres toiles connues sont aussi là. Marthe, femme et muse, enlumine la baignoire de sa villa cannettane, nous projetant dans un univers onirique doucement érotique. Considéré comme un authentique chef d’œuvre « L’amandier en fleurs » (1946-1947), peint peu de temps avant sa mort, est là, si plein d’énergie et d’optimisme pour le futur. Surprenante, cette huile sur toile de plus de cinq mètres carrés, une commande destinée à décorer un hôtel parisien (1927). Bonnard revisite son environnement et s’autorise une composition fantaisiste qui rassemble des éléments improbables, personnages, montagnes, restanques, oliveraies, palmiers… pour attirer le regard du spectateur vers le centre du tableau, masse jaune et vibrante.
Certaines de ses peintures, moins connues, sont d’une modernité bouleversante. Ainsi, « Les Voiliers, Régates, 1911-1912 » ou « Le Nuage sur la mer, vers 1930 » ou mieux encore, les « Baigneurs à la fin du jour, vers 1945 », taches éblouies et éblouissantes, sur un fond de vagues bleues dont les creux sont verts, irrégulièrement ourlées d’une crête blanche. Les lignes horizontales se succèdent, à l’horizon, le rouge couchant se mélange au ciel bleu…
S’il n’y a pas d’urgence à visiter le Musée qui est fait pour durer, cette exposition doit absolument être vue par quiconque s’intéresse à l’Art en général et en particulier à cette période riche qui vit cohabiter, Gauguin, Van Gogh, Vuillard, Vallotton, Signac et Matisse, l’ami fidèle et tant d’autres. Pendant longtemps et malgré son succès de son vivant, il était resté dans l’ombre des grands. Ce Musée qui lui est entièrement dédié, les pièces qui vont peu à peu meubler les salles et les expositions temporaires qui s’y dérouleront, vont contribuer à lui donner la place qu’il mérite.
- Musée Pierre Bonnard – 16 bd Sadi Carnot – 06 110 Le Cannet – conservateur : Véronique Serrano - de 10 à 20 h, du mardi au dimanche – jusqu’à 21 h le jeudi - tel. 04 93 94 06 06 - de 3,5 à 7 € l'entrée.
- Exposition : « Bonnard et Le Cannet, dans la lumière de la Méditerranée », jusqu’au 25 septembre - catalogue, éditions Hazan, 25 € -
- vue du Cannet, 1927, huile sur toile, 233,6 x 226,6 - don à l'État de la Fondation Meyer, dépôt du Musée d'Orsay -