Cannes : le G20 fait réagir...
Si nos édiles se délectent déjà à la perspective de frayer avec les hommes et les femmes les plus importants de la planète et se faire prendre en photo avec eux, si certains commerçants se réjouissent - toujours les mêmes - d’autres font grise mine, surtout quelques uns qui étaient en place dans les années 90 et qui ont vu le Centre de la ville déserté.
Suite à notre article sur le sujet du zonage de Cannes pour les jours et semaines qui précéderont cette manifestation internationale, lire ici une lectrice se rappelle avoir vécu en première ligne un événement similaire :
« Lorsque le Sommet européen eut lieu à Cannes en juin 1995, je travaillais rue d’Antibes. J’en avais retenu quelque chose d’assez étonnant. On pouvait en effet écouter… le silence sur la Croisette. Un phénomène acoustique assez rare qui n’est possible qu’en altitude, loin de tout. Je m’en suis toujours souvenue. À cette époque, seuls les employés d’hôtels portaient un badge et étaient autorisés à pénétrer dans les grands hôtels. Les intérimaires étaient mis en congés et ne pouvaient travailler durant ces 2 jours de congrès exceptionnels. Les rues étaient barrées au sud de la rue d’Antibes. Le périmètre de sécurité était beaucoup plus réduit que celui annoncé pour le prochain G20 et on pouvait marcher sur la Croisette sans badge. »
La situation dans le monde a bien changé depuis et les contraintes liées à l’insécurité ont grandi. La facture qui va avec aussi. Chaque grand événement, institutionnel ou privé, doit s’assurer que toutes les précautions soient prises pour éviter un attentat ou les débordements d’éventuels manifestants. Cette politique sécuritaire devenue indispensable, a une incidence de plus en plus grande sur les équilibres budgétaires. On le voit bien avec l’organisation des Jeux Olympiques qui coûtent de plus en plus cher. Chaque structure d’accueil, telle la SEMEC pour le Festival du film ou pour le moindre congrès, doit ainsi mettre en place des mesures jugées souvent pénibles pour les participants qui doivent ouvrir… leur sac, y compris lorsqu’ils regagnent leur pénates ou honorent un rendez-vous d’affaire ou une invitation dans un Palace de la Croisette… Il y a fort à parier que le G20 de 2011 ne ressemblera pas au Conseil européen de 1995 ni au Sommet des chefs d’États africains de 2007, eux aussi organisés à Cannes.
Un autre lecteur et collaborateur occasionnel, Gérard Charlier de Vrainville, se pose des questions et fait preuve d’un certain pyrrhonisme… teinté d’humour :
« Pourquoi font-ils cela à Cannes ? Il y a des régions comme la Lozère ou le Cantal où il y a de l'espace pour accueillir de telles agapes mondiales. Je dis bien agapes car ce genre de sommet ne sert pas à grand chose et, le plus généralement, ne règle rien, si ce n'est satisfaire l'ego de nos chers dirigeants et du maire de la ville d’accueil. J'espère que les Cannois s'en souviendront lors des élections car, contrairement à ce que l'on peut penser, cela fait perdre beaucoup d'argent aux hôtels qui sont payés à cette occasion… au tarif syndical et perdent des congrès bien plus intéressants pour les commerçants. En effet, personne ne veut ni ne peut venir en ville pendant au moins deux jours. Quant aux fournisseurs du sommet, ils viennent souvent de l’extérieur, ne laissant aux locaux que des broutilles. Notre président, lui, va faire son show médiatique pour essayer de remonter le courant et grimper dans les sondages. Il parait qu'il gère bien les crises… - La guerre en Libye sera courte, vous verrez ! - On voit effectivement ! Une guerre à plus de 250 000 € la bombe selon l’Expansion. À ce prix là, on comprend mieux que la facture prévisible (rien que pour la France) atteigne 1 million € par jour. Maintenant le comble, les opposants à Khadafi s'entretuent entre eux ! Le chef des rebelles que notre gouvernement a reconnu, s'est fait assassiné par son garde du corps. Bravo et merci à BHL, conseiller et expert en la matière. »
Toutes ces dépenses viennent s’ajouter à celles occasionnées par nos engagements au Kosovo, au Liban, en Afghanistan (la facture est aussi de 1 million € par jour rien que cette dernière destination)… Même si le magazine Le Point relativise ces chiffres, l'air de dire, au fond ce n'est pas cher payer un peu de liberté, les dépenses en cascade font grimper le… déficit. Qui s'en émeut ? Les Français interrogés sont, d’après un sondage IFOP, 65 % à se dire favorables à l’intervention en Libye. Comme dirait Fernand Dartigues, « faut pas être plus royaliste que le roi ! »