Polémique autour de l’abaissement de la vitesse à 80 km/h.
Le gouvernement, par l’entremise de la DSR (Délégation à la sécurité routière), réagit et argumente à propos de la publication de chiffres erronés sur le bilan de la mesure d’abaissement de la vitesse à 80 km/h.
Un « comité indépendant d’évaluation du 80 km/h », en fait une émanation de l’association 40 millions d’automobilistes, particulièrement hostile à cette mesure, a produit une étude mettant en cause les résultats fournis par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), sur le bilan tiré, du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019, de l’abaissement à 80 km/h de la vitesse maximale autorisée sur les routes bidirectionnelles sans séparateur central.
L’auteur de cette étude, qui semble constituer à lui seul le comité indépendant, évoque avec un sens affirmé de la nuance, « les deux fiascos » relatifs au nombre de décès évités et au temps perdu par les usagers de la route liés à l’entrée en vigueur de cette mesure. Qualifier de fiasco une mesure qui "n'a permis de sauver que 39 vies" (sic), selon lui, démontre en soi le peu d’importance accordée par l’auteur de ces propos à la vie humaine.
Les conclusions de cette étude ayant été reprises par certains médias [et sur Internet], la Délégation à la Sécurité routière souhaite apporter les précisions suivantes :
L’ONISR, rattaché administrativement à la Délégation à la sécurité routière (DSR), exerce son activité statistique dans une totale indépendance professionnelle. Les séries statistiques produites par cet observatoire font l’objet d’une labellisation par l’Autorité de la Statistique publique qui veille au principe d’indépendance professionnelle dans la production et la diffusion de la statistique publique.
Le bilan établi par le CEREMA sur la baisse de la mortalité sur les routes bidirectionnelles sans séparateur central - une baisse de 206 décès sur la première année de mise en œuvre de l’abaissement de la vitesse maximale autorisée - s’appuie sur une méthode statistique claire et fiable comparant la période juillet 2018 - juin 2019 avec la moyenne constatée des décès sur les 5 années précédentes (juillet-juin) sur ce même réseau. Cette méthode permet de lisser les effets conjoncturels des variations de la mortalité routière.
A l’inverse, de graves lacunes méthodologiques affectent les calculs proposés par l’auteur de l’étude du « comité indépendant d’évaluation du 80 km/h » qui conclut à une baisse de 39 morts. En particulier, l’auteur considère à tort la vitesse comme une cause résiduelle des accidents, indépendante de l’ensemble des autres facteurs d’accidentalité. Une telle approche ignore le facteur aggravant que constitue la vitesse lors des accidents de la route. Ce biais introduit une sous-estimation massive du rôle de la vitesse dans l’accidentalité.
De même, les estimations relatives à la perte de temps liée à l’abaissement de la vitesse autorisée, relèvent de calculs théoriques abstraits sans lien avec les situations réelles de conduite prises en compte dans l’étude conduite, à partir d’un échantillonnage de 298 itinéraires réels, par le CEREMA qui met en évidence des pertes de temps d’environ une seconde au kilomètre et des gains de temps dans 34 % des situations.
Le coût du changement des panneaux, 150 millions € selon l’auteur, suffit à montrer l’ampleur de l’infox : l’État, à la mi-septembre 2019, avait remboursé 1,61 M€ pour 8 100 panneaux dans 77 départements. L’auteur ne s’est même pas donné la peine de vérifier auprès de la délégation à la sécurité routière. L’ampleur des erreurs méthodologiques de tels travaux est assimilable à de la tromperie. Elle doit être dénoncée.
NDLR : l’abaissement à 80 km/h de la vitesse maximale autorisée, ce n’est quand même pas la mer à boire pour des conducteurs davantage soucieux de leur sécurité et de celle d’autrui que d’arriver pile poil à un rendez-vous, sachant que cette mini-mesure concerne uniquement les routes bidirectionnelles sans séparateur central.
D’autres mesures de bon sens et de cohérence devraient aussi concerner les fabricants de véhicules motorisés, automobiles, motos, camions… Pourquoi en effet continuer à mettre sur le marché des véhicules capables d’atteindre, avec des accélérations faramineuses, des vitesses dépassant largement les 160 km/h ? Propositions commerciales (soutenues par des campagnes publicitaires agressives) qui frisent le ridicule et qui sont des incitations à prendre des risques inconsidérés. L’industrie de l’automobile … véhicule bien des fantasmes de nos concitoyens. Il y a même chez certains le culte de la vitesse, l’expression de leur machisme… Nous avons cru que la voiture (et le moto allaient nous délivrer du temps et nous offrir un espace de liberté. Il y a sans doute un petit âge d’or… C’est terminé tout ça, le tout auto-routier nous a... tuer ! Il est nécessaire de rectifier le tir et de tenir compte du principe de réalité : la démographie ne fait pas de cadeau.