L’ami Daniel est un perfectionnisme et un minimaliste, amateur de haïkus. Chaque mot est pesé, chaque majuscule ou son défaut, chaque virgule ou son absence aussi. L'illustration est de Nathalie Maubert.
La maison des Avions perdus
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J’habite après un long silence
Ces avions perdus dans les herbes
Parmi les ailes immobiles
Seuls semis entre sol et ciel
Je sais qu’un jour l’Instant viendra
Qui vole interminablement
Au loin très loin dans les années
Pour rouiller l’air dans les carlingues
Colorer de mort les moteurs
Les fuselages usagés
Que viens-tu chercher dans ces lieux
Le Soleil gelé des hélices
En attendant en attendant
Aux avions perdus dans les herbes
Où j’habite un très long silence
Entre lizerons et lézards
Je m’occupe petitement
À vieillir ainsi qu’un enfant
En cachette comme un enfant
J’habite après un long silence
Ces avions perdus dans les herbes
Parmi les ailes immobiles
Entre la langueur et hangars
Je sais qu’un jour l’Instant viendra
Qui vole interminablement
Pour de très haut dans les années
Colorer de mort les couleurs
Le vent lové dans les carlingues
Dans les fuselages logé
Que viens-tu guetter en ces lieux
Hélice aux Pays du Sommeil
En attendant en attendant
Aux avions perdus dans les herbes
Où j’habite un très long silence
Entre langue morte et carlingues
Je m’occupe petitement
À vieillir ainsi qu’un enfant
En cachette comme un enfant
J’habite après un long silence
Ces avions perdus dans les herbes
Dans la loge des fuselages
Entre longue mort et carlingues
Je sais qu’un jour l’Instant viendra
Qui tombe interminablement
Du ciel sali par les années
Sur l’ange mort des fuselages
Sous le regard des hangars vides
Parmi les ailes inutiles
Que viens-tu voler en ces lieux
Les chiffres aux cadrans figés
En attendant en attendant
Aux avions perdus dans les herbes
Où j’habite un très long silence
Dans les hangars une très longue heure
Je m’occupe petitement
À vieillir ainsi qu’un enfant
En cachette comme un enfant
J’habite après un long silence
Ces avions perdus dans les herbes
Avec l’âge des fuselages
Les lézards et les bizarreries
Je sais qu’un jour l’Instant viendra
Qui touche interminablement
Le sol linceul de nos années
À l’angle mort des hangars vides
Près du fuseau des fuselages
Parmi les ailes immobiles
Que viens-tu rêver en ces lieux
De cette mort sans pourriture
En attendant en attendant
Aux avions perdus dans les herbes
Où j’habite un très long silence
Où je vais seul entre mes cils
Je m’occupe petitement
À vieillir ainsi qu’un enfant
En cachette comme un enfant
Pour Teddie, pour Manou, pour Lucile, pour Marcus