Le pétrole : « Je suis partout ! »

Jade Lindgaard dénonce son omniprésence dans son édito (publiée dans la Lettre écologie de Médiapart) : « Vous reprendrez bien un peu de pétrole ? »



- géopolitique du pétrole © CC BY 2.0 -

Au Pérou, une marée noire d’une ampleur sans précédent souille plus de 40 kilomètres de côtes suite à un accident dans une raffinerie du groupe espagnol Repsol. En Amazonie, une fuite de pétrole contamine depuis fin janvier une aire naturelle protégée et une rivière du nord-est de l’Equateur, en raison de la rupture d’un oléoduc de la société privée OCP. Dans le golfe de Thaïlande, 60 000 litres de pétrole se sont déversés, en janvier 2022, quand un olédoduc de l’entreprise SPRC s’est mis à fuir dans la mer. Au large du Yemen, un vieux navire pétrolier chargé d’un million de barils de pétrole et abandonné depuis 2015 se délite peut à peu, au risque de répandre sa cargaison dans la mer rouge, alerte l’ONG Greenpeace.

Et à Paris, dans la Tour TotalEnergies, on sabre le champagne : les résultats économiques sont inespérés. Le groupe pourrait annoncer le résultat net le plus élevé jamais réalisé par une entreprise française : autour de 15 milliards d’euros, selon l’estimation de l’agence Bloomberg, dont fait état Le Monde dans son édition du 1er février. D’un côté, les milieux vivants détruits par l’extraction et le transport du pétrole. De l’autre, les profits mirifiques dégagés par le business de l’or noir. Deux salles, deux ambiances. Dans l’espace béant qui les sépare, éclate toute la violence du déni des dangers des pollutions pétrolières.

L’alerte sur les dérèglements du climat a peut-être occulté dans certains esprits la gravité de la menace des marées noires. En 2010, au moment de l’explosion de la plateforme Deep Water Horizon, exploitée par BP dans le golfe du Mexique, Barack Obama avait comparé la catastrophe au 11 septembre, et appelé à revoir « notre manière de penser l’environnement et l’énergie ». Tout le monde ne l’a pas entendu. En ce début 2022, TotalEnergies et ses partenaires célèbrent à Kampala, la capitale de l’Ouganda, leur « décision finale d’investissement » pour exploiter les champs pétroliers de Tilenga et construire le méga-oléoduc EACOP à travers la Tanzanie.

Malgré les déplacements massifs de population, la répression de celles et ceux qui s’y opposent, le risque de pollutions sur l’un des plus grands lacs d’Afrique, et les dizaines de millions de tonnes de Co2 qu’ils vont émettre, ces projets pétroliers sont soutenus par l’État français. En Afrique, des militant·e·s du mouvement Fridays for future crient « Stop EACOP ». Àl’Élysée, personne ne les écoute.  

  • Business is business et après moi le déluge !