Accès à l’information. L’édito d’Arnaud Marquant...
La tenue, le 28 septembre, de la Journée mondiale du droit d’accès à l’information nous rappelle combien ce sujet demeure d’actualité. Surtout dans une société où l’information se trouve de plus en plus monétisée, et liée à d’importants investissements financiers.
L’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme met en avant la liberté « de chercher, de recevoir et de répandre les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit ». Intimement lié à la liberté d’expression, ce droit est garanti par la loi. Dans une société démocratique telle que la nôtre, il revêt au moins deux réalités que la communauté des veilleurs connaît bien.
Quand la monétisation freine l’accès à l’information
La première de ces réalités concerne l’information journalistique. En France, où la presse – et singulièrement la presse quotidienne d’information – connaît une crise structurelle tout autant que conjoncturelle, l’information se trouve de plus en plus monétisée. Nécessairement sensibles à la notion de retour sur investissement, les éditeurs doivent assurer des revenus susceptibles de garantir aux journalistes les conditions d’exercice minimales de leur profession. Ils le font en empruntant principalement deux voies. La première est celle de l’abonnement, et renvoie à des pratiques sociétales où nos services sont de plus en plus mensualisés (depuis l’abonnement à une plateforme de streaming jusqu’à la livraison régulière de produits frais). La seconde est celle de la publicité, dont la récurrence peut parfois venir contrarier l’accès à l’information (les pop-ups en sont l’un des exemples). Dans un cas comme dans un autre, nous observons qu’il est devenu plus difficile de s’informer de manière simple, efficace et immédiate, d’autant que les reprises successives d’une même information par de nombreux médias annexes peuvent générer des phénomènes de distorsion.
Accéder à l’information publique : le cas de l’Open Data
L’accès à l’information revêt également une autre réalité, en phase avec la Déclaration universelle des droits de l’homme votée par l’ONU en 1948. Cet accès est défini par le droit de chercher, de recevoir et de diffuser l’information détenue par les organismes publics. En France, cette approche nous renvoie directement à la politique d’Open Data qui s’est développée au cours des années 2010. Depuis une dizaine d’années, certaines administrations ont réussi à déployer d’importants moyens. C’est par exemple le cas du site Legifrance, service public de la diffusion du droit sur lequel se retrouvent notamment l’intégralité des textes du droit national en vigueur ainsi que du droit et de la jurisprudence de l’Union européenne (sans compter un ensemble de textes qui entourent les différentes lois). Le moteur de recherche de Legifrance est particulièrement bien conçu, avec des filtres en amont, une arborescence claire et une interface retranscrite dans une API qui permet de récupérer l’information. Mais ce cas est encore loin d’être majoritaire. Dix années après l’ouverture des données publiques, force est en effet de constater que certaines administrations ne disposent toujours pas des moyens suffisants leur permettant d’ouvrir l’intégralité de leurs données. À défaut d’API, les veilleurs sont redirigés vers des sites et des plateformes qui se révèlent vieillissants – et donc pas aisés à monitorer. Dans ce cas précis, seule une solution de veille Internet permet de s’adapter.
En France, le droit d’accès à l’information est une réalité, mais celle-ci comporte plusieurs facettes. Si l’information dite « blanche » (c’est-à-dire gratuite) est facile à trouver, les informations « grise » (payante) et « noire » (cachée, à l’image du Dark Web) le sont moins. En cause, une monétisation de l’information qui rend plus délicat certains accès… au risque de créer, à terme, une société d’« informés » – pour ne pas dire de citoyens – à deux vitesses.
Arnaud Marquant Directeur des opérations KB Crawl SAS